1- Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Après avoir commencé très jeune, j’ai travaillé pendant près de 10 ans à l’étranger, notamment au Kosovo, à Madagascar, en Algérie et en Tanzanie, sur des projets de développement, de microfinance, de soutien aux populations vulnérables.
Ces années ont forgé ma conviction que le lien social, l’innovation et l’accompagnement des publics éloignés sont essentiels à une société plus juste.
De retour en France, j’ai poursuivi ce parcours dans des fonds d’impact, des institutions européennes et aujourd’hui chez Bayard, où je dirige un fonds d’innovation sociale.
Mon rôle est de développer des projets qui mêlent culture et lien social pour lutter contre la fragmentation de la société. En travaillant avec des équipes internes et des partenaires extérieurs au service de ces projets, je contribue à la transformation de l’entreprise.
Je n’ai pas d’équipe hiérarchique, mais je m’appuie sur le management transversal et la co-construction.
2- Qu’est-ce qui, selon vous, a radicalement changé ces 3 à 5 dernières années dans le métier de manager et la gestion d’équipe intergénérationnelle ?
Leur manière de manager était très en avance sur ce que j’avais pu voir en France à l’époque : beaucoup plus d’écoute, de respect des collaborateurs, de légitimité par la compétence plutôt que par la hiérarchie, jamais d’humiliation, pas d’autorité sèche, mais au contraire, de l’empathie et une vraie attention aux équipes.
Et je mesure aujourd’hui à quel point la France a su évoluer : ce que je percevais comme « révolutionnaire » il y a 20 ans est devenu, heureusement, la norme dans beaucoup d’organisations.
On ose plus écouter les collaborateurs, poser des objectifs clairs tout en étant attentif aux besoins et aux aspirations individuelles.
Bien sûr, tout n’est pas parfait, mais il y a eu un vrai virage : on comprend mieux que pour engager, il faut embarquer les équipes, donner du sens, et créer du lien humain.
Cela me semble une avancée essentielle pour le management d’aujourd’hui.
3- Comment avez-vous réussi à gérer ces changements ?
Quand on n’est pas manager en titre, mais qu’on doit emmener des projets de transformation, l’adhésion passe par la confiance et la relation.
Mon approche est de comprendre les besoins des équipes, leurs freins, leurs envies, et de voir comment on peut y répondre tout en avançant sur les projets.
J’accorde beaucoup d’importance à la clarté des objectifs, et je veille à expliquer le « pourquoi » derrière chaque projet.
Je m’appuie aussi sur des réseaux professionnels, pour ne pas rester isolée. Car être en posture transversale, c’est parfois être seule. Le partage avec ses pairs est un vrai soutien.
4- Selon vous, quels sont les 3 points de vigilance pour une femme qui prendra un poste comme le vôtre en 2025 ?
Céline partage ses 4 conseils clés pour les futures dirigeantes :
Ne pas rester seule : S’entourer, échanger avec ses pairs, rejoindre des réseaux professionnels pour trouver du soutien et s’enrichir des expériences des autres.
Écouter son cœur et s’aligner avec ses valeurs : C’est ce qui donne la force d’avancer et de défendre des projets qui ont du sens.
Oser s’imposer et demander sa place : Les femmes ont parfois tendance à attendre qu’on leur propose une opportunité. Il faut oser dire ce qu’on veut, même si ce n’est pas parfait, même si on doute.
Ne te prends pas trop au sérieux : Il est normal (et salutaire) de faire des erreurs. L’apprentissage nous enrichit.
5- Selon vous, quel est le sujet dont on ne parle pas assez sur LinkedIn dans le management ?
J’aimerais qu’on parle davantage de l’échec et de la vulnérabilité.
Sur LinkedIn, tout le monde réussit tout, tout le temps. Mais la réalité, c’est qu’on apprend énormément de ses échecs, et en parler permettrait plus d’authenticité et d’inspiration.
Je crois aussi qu’on gagnerait à voir plus de diversité, d’aspérités, parce que c’est dans la différence qu’on s’enrichit.

Le mot de la fin
« Aucun pessimiste n’a jamais découvert le secret des étoiles, navigué jusqu’à des terres inconnues ou ouvert un nouveau chemin pour l’esprit humain. » (Helen Keller)
Cette citation m’accompagne depuis longtemps. Elle me rappelle que pour oser innover, pour aller vers des projets qui sortent des sentiers battus, il faut avoir le courage d’y croire, même quand le chemin semble incertain.
C’est une invitation à garder l’espoir, à rêver grand, et surtout à avancer malgré les doutes, car ce sont ces pas vers l’inconnu qui permettent de créer du neuf et d’ouvrir des voies pour les autres.
Dans mon travail comme dans la vie, je la garde en tête pour ne pas me laisser freiner par le scepticisme ambiant, et continuer à croire qu’on peut transformer les choses, même à petite échelle.
Révons, osons, et avançons vers nos propres étoiles.”
Le mot de Sabine
Je connais Céline depuis longtemps.
Et pourtant, je n’avais jamais pris la mesure de son parcours.
Je ne savais pas qu’elle avait travaillé à l’international, ni qu’elle portait aujourd’hui une vision du leadership aussi singulière.
J’ai découvert une manière de faire bouger les lignes sans lien hiérarchique, avec beaucoup d’écoute, de clarté et de conviction.
Cette interview m’a fait prendre conscience d’une chose toute simple : on connaît rarement vraiment le parcours professionnel des personnes qui nous entourent.
Par pudeur, par manque de temps, parce qu’on reste souvent à la surface.
Et parfois, derrière une posture discrète ou un rôle qu’on croit comprendre, il y a une richesse d’expériences, de choix, de convictions qu’on n’avait jamais vues.
Depuis, je prends un peu plus le temps de poser des questions, de creuser, d’écouter différemment.